4 Novembre 2012
Nous avons pensé qu'il était bon de continuer à mettre en exergue les réponses de Dominique Blanc à Luc Thoby sur les questions posées précédemment autour de la difficulté de l'union entre les associations ou syndicats d'ostéopathes.
Ce qui suit concerne essentiellement la question d'un éventuel livre V du code de la santé publique dont certains ont pensé que la création était réalisable pour intégrer les ostéopathes dans une case profession de santé.
A ce qu'il semble les choses ne sont pas aussi simple que certains l'ont laissé entendre.
Suivent donc quelques explications teintées parfois d'un peu d'impatience. On se souvient que tous les commentaires dont sont extraits les lignes ci dessous figurent dans leur intégralité, au bas de l'article "Traits ou trait d'union".
Bonsoir Luc
Merci pour tes commentaires.
Je ne refuse pas le Livre V, je dis que c’est une utopie. Il y a une grande nuance.
Penses-tu que les ostéopathes soient en mesure d’accepter ou de refuser une telle idée ?
Il me parait intéressant d’essayer de développer sur le sujet.
Actuellement, compte tenu de notre niveau de formation nous sommes dans une sorte de « no man’s land administratif ». Dans aucun livre du CSP, mais en marge, pas vraiment dans les annexes, mais presque.
Si cela comporte des inconvénients, certes importants, que nous regrettons tous , il ne faut pas non plus oublier qu’il y a certains avantages non négligeables (consultant de première intention et … liberté des prix et … d’exercice) !! Excuse-moi du peu !!
Nous avons dans notre profession beaucoup d’ostéopathes qui voudraient nous faire entrer DES MAINTENANT dans des normes, des règlements, des codes qui, comme je le disais, voudraient être au même niveau que les médecins.
Nous affirmons que ce n’est pas la priorité.
Encore une fois la priorité c’est le niveau de formation.
Revenons à cette notion de Livre 5.
Le Droit français est très complexe, très structuré et il n’entérine que très progressivement les évolutions de notre société. Il suffit de rechercher dans l’histoire de la sociologie française pour constater cette réalité.
Le Code de la Santé Publique (CSP) est né en 1953.
Il intègre deux aspects juridiques : législatif et réglementaire.
Il est composé de 6 parties, elles-mêmes divisées en livres, dont celui des profession de santé (professions médicales pharmaceutiques et auxiliaires etc..) des titres, plus de 10 000 articles et chapîtres.
J’en passe, il te suffit de le consulter et de faire quelques recherches pour comprendre sa complexité et voir aussi à quel point il n’est pas si simple de le modifier.
Alors bien sûr certains n’ont pas hésité à imaginer que sur simple proposition d’UN député, l’Etat allait créer pour une profession à peine naissante, ayant à peine 10 000 professionnels, un nouveau livre pour leur permettre de s’appeler profession de santé.
Il faut être très naïf pour penser qu’un homme, quand bien même serait-il professeur de médecine, médiatiquement connu, puisse changer notre monde de la Santé.
Est-ce que l’étiopathie a été reconnue alors que notre ancien Président, premier personnage de l’Etat consultait régulièrement un étiopathe ?
Est-ce que l’ostéopathie l’a été alors que Jacques Chirac était traité par un ostéopathe ?
Est-ce que le fait d’être traité par un ostéopathe a empêché Monsieur Fillon alors Premier Ministre de faire, par le Conseil Constitutionnel, « retoquer » la loi qui nous donnait les 3520h.
Il faut être très gogo (permet-moi ce mot d’humour !!) pour croire à une telle fable. Je t’ai parlé de l’attaché parlementaire de B.Debré.
Je voudrais ce soir te décrire un peu mieux le fonctionnement de nos institutions.
Autour du Président de la République un premier cercle, un deuxième et quelques autres avec des conseillers officiels (santé, affaires sociales, enseignement, consommation), des chargés de mission, des conseillers spéciaux.
Autour du Premier Ministre, même chose, plus quelques comités Théodules .
Une Assemblée Nationale avec des commissions dont une, la commission des affaires sociales (70 membres dont certains plus importants que d’autres).
Un Sénat avec, de la même façon (Commission des Affaires Sociales 57 membres, là aussi avec des personnes plus influentes que d’autres)
Ajoutons des offices parlementaires dont on n’entend peu, voire jamais, parler mais qui ont une influence grandissime.
Un Ministère de la Santé avec :
- Un cabinet ministériel et des conseillers techniques auxquels se rajoutent des chargés de mission
- deux directions : la Direction Générale de la Santé (DGS), et la Direction Générale de l’Organisation des Soins (DGOS), celle-ci, plus en charge de notre dossier
Et gravitant autour de tout ce beau monde des ostéopathes certes mais aussi de puissants lobbies médicaux, kinésithérapiques ou pharmaceutiques.
Et il ne faut pas penser que tout baigne dans l’huile entre Elysée, Matignon, Parlement et Ministère. Les conseillers se tirent dans les pattes, les chargés de mission rédigent des rapports contradictoires, les lobbies influencent, et avant qu’une loi, une ordonnance, un décret, un arrêté ne soit publié au JO, je puis t’assurer qu’il y a de sacrées discussions et de surprenants « arbitrages ».
Il faut donc mettre en place une stratégie de longue haleine pour tenter de convaincre le MAXIMUM de personnes.
Il faut surtout montrer sa cohérence et exposer des argumentaires solides et étayés, basés sur des éléments sociologiques, historiques et… européens pour commencer à être pris au sérieux.
Ceux qui disent que le Ministère ou les politiques ne comprennent rien à nos problèmes sont des fats et des présomptueux.
Nous avons en face de nous, des hauts fonctionnaires, des énarques, des directeurs d’hôpitaux, des hommes politiques aguerris qui ont un cerveau qui fonctionnent plus vite que le nôtre !!
Ils disposent de renseignements sur nous, sur notre profession, sur notre situation démographique et économique. Ils connaissent tous les rouages des textes et de l’Administration. Ils sont secondés par les plus grands juristes.
Ils sont intelligents, rusés, malins et disposent de beaucoup de cartes que nous n’avons pas.
Ils nous testent, nous jaugent, nous jugent et lorsque nous ne tenons pas la route ils sont très habiles pour nous faire entendre… ce que nous voulons entendre et … ne rien nous donner.
Alors quand nous entendons le discours d’un président d’association qui n’a aucune expérience de ces relations, nous faire une description (juste avant son AG) de sa première entrevue avec un conseiller technique en totale opposition avec ce que nous entendons de multiples autres canaux, nous savons qu’il n’a pas employé les bons arguments.
Et lorsque nous entendons tous ces beaux parleurs nous affirmer que – croix de bois-croix de fer – nous allons obtenir un master +un doctorat +un Livre5 + un Haut Conseil,
Nous ….sourions !!!
Et je ne reviendrai pas sur la g… du Haut Conseil !!
Alors que fait l’UFOF ?
Et bien elle essaie d’être prise au sérieux !! Et il semble qu'elle ne réussit pas trop mal !! (Oh mon Dieu je nous vante !! ) Son bilan plaide cependant pour elle ( j’y reviendrai !!!)
Elle travaille à tous les niveaux sans relâche, dans la …discrétion et dans l’ombre. Car plus nous communiquons plus nous générons de réactions hostiles de nos adversaires. (Je te renvois à l’article paru sur notre site sur la discrétion)
Nous sommes présents partout même dans des think tank et autres groupes de réflexion proches de tous ces décideurs.
Là aussi, c’est un travail collectif tous azimuts !! Travail que nous menons depuis plus de 20 ans.
Je rappelle une nouvelle fois pour lutter contre cette morosité ambiante, que nous sommes la seule profession de soins à la personne à avoir émergé depuis 40 ans.
Il ne faut jamais l’oublier.
Et aujourd’hui nous partageons notre expérience et notre savoir-faire avec ceux des autres associations du GFIO.
Je sais qu’on décrie beaucoup le GFIO.
Il n’empêche que nous menons, au sein d’une même structure, un vrai travail collectif et que nous présentons ensemble aux différents interlocuteurs le consensus (c’est à dire à l’unanimité) qui nous réunit. Que c’est du concret !!
C’est la première fois que cela se fait. Les grincheux peuvent … grincer !! Cela ne me paraît pas anecdotique.
Et je peux affirmer que nous prenons un réel plaisir à nous épauler et partager nos points de vue.
Nous ferons le bilan dans quelques mois !! Lorsque les nouveaux textes seront sortis !!
Pour terminer sur ta dernière réflexion sur la « lutte de leadership ».
Ce n’est pas le leadership qui est en cause c’est la survie économique des écoles.
C’est l’enjeu commercial qui prime et qui fait que certaines (et je ne généralise pas, je dis bien certaines) écoles veuillent diriger les professionnels pour mieux faire vivre leur business.
C’est aussi pour ça que l’UFOF dérange autant !! Parce que nous nous sommes toujours opposés à cette main mise, que nous avons toujours préservé farouchement notre indépendance !!
Bonne nuit
Cordialement
Dominique