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Enfants de Still

Les progrès obtenus avec la publication des décrets du 12 décembre 2014, notamment sur le plan du cursus des études et de l'agrément des écoles ne suffisent pas à relâcher la vigilance. La supplique de Still avant sa mort reste totalement d'actualité : Keep it pure Boys, keep it pure.

Sur la place de l’ostéopathie dans le quotidien, sur la manière dont elle peut être appréhendée par celui qui pratique.

 

 

Il est difficile d’imaginer une autre destinée pour l’ostéopathie que celle d’être au service de l’autre. En cela, elle incarne la manifestation principale de l’éthique (au plus simple, on peut dire que l'éthique est la recherche du bien pour l'autre). Elle est aussi dans ce qui, poussé à son extrême, deviendrait une forme de renoncement à soi, l’une des voies possibles de la démarche spirituelle dans laquelle il s’agit de progresser d’une attitude centrée exclusivement sur le moi (moi, moi) vers un comportement qui privilégie l’autre en passant par des étapes successives telles que :

- Moi et l’autre – l’autre et moi – jusqu’à la rarissime et idéale - l’autre rien que l’autre -.

 

Il est assez clair que cette manière de voir les choses n’a pas pour projet de devenir quoi que ce soit de ressemblant à une exigence. Chacun voit midi à sa porte et personne n’est obligé de cheminer sur la voie de la sainteté, cependant il semble tout de même utile, voire indispensable de prendre conscience de toutes les données concernant la profession qui va occuper le reste de sa vie. C’est probablement le jeune professionnel ou l’étudiant qui peut, éventuellement, être le plus concerné par ce type de réflexions encore qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire ou, en tout cas, pour se poser les bonnes questions.

 

Aborder une profession dédiée à l’autre qui va permettre en même temps que son développement personnel, l’édification de sa propre personnalité est une sorte de gageure qui doit prendre conscience du paradoxe qu’elle manie. La notion de développement personnel présentant le risque d’un double sens, il vaudrait mieux évoquer, pour être plus clair, le développement de la carrière personnelle ou encore la recherche d'un ancrage social favorable. 

Nous savons bien, et pour cause, que cette société est construite à l’évidence sur des règles où, l’autre étant le plus souvent regardé comme un concurrent, la loi la plus couramment appliquée est celle du "moi d’abord". Or cette loi ne tient pas et ne peut pas tenir dans une activité dont l’autre est l’objet essentiel. Cette "imposibilité" implique une difficulté éthique qui devrait être ressentie au minimum par toutes les professions de santé. Il est donc impératif que les acteurs de toutes ces professions, quelles qu'elles soient, aient la capacité d'écarter l'attitude égoïste que la société monte en épingle dans l'exercice même d'une activité que cette société rémunère, sans oublier de la taxer d'ailleurs.

Le "moi-d'abord" n'est pas défendable lorsqu'il est pratiqué par quelqu'un qui a la charge des intérêts de l'autre, particulièrement s'il s'agit de sa santé ou éventuellement de sa vie. C'est tout le paradoxe d'une activité altruiste par excellence que d'être encouragée à développer son égoïsme, mais ce peut être toute sa gloire que de savoir y résister.

Compte tenu de l’orientation qu’a prise la médecine soumise à la technologie et à l’industrie, elle semble malheureusement prisonnière de la notion de concurrence. Ceci la conduit à une politique de santé de masse dans laquelle les individus comptent hélas pour " du beurre " même si cela s'efforce de ne pas apparaître dans le discours officiel. Il suffit de relire les réflexions de tel ou tel responsable sur les conséquences de certaines campagnes de vaccinations quasi industrielles, lorsque quelques centaines de personnes en subissent des conséquences parfois irréversibles, pour s’apercevoir que :  sur les millions de personnes vaccinées et réputées protégées, cela ne compte pas.

 

La grande chance de l’ostéopathie et des ostéopathes s’ils savent la saisir, c’est de n’être, jusqu’à maintenant, liés par aucune notion de marché. L’auto-guérison n’est pas à vendre, elle est la propriété de chacun et "l'expropriation de la santé" qui sous-titrait déjà "La némésis médicale", ouvrage publié en 1974 dans lequel Ivan Illich décrivait la manière dont le système dit de santé, exploitait la maladie sur le plan économique est, si je puis dire, de plus en plus d'actualité. Ce que note également le docteur Gilles Andres dans son livre : "Principes de la médecine selon la tradition"- "Nous pensons aux ouvrages d'Ivan ILLICH, et notamment à Némesis médicale. Son analyse est percutante et difficilement contestable. Un des points les plus importants semble bien être la critique de la monopolisation de la santé et de la médecine par le corps médical. La réaction violente et passionné de celui-ci à cette critique prouverait qu'ILLICH a visé juste et touché un point sensible. C'est effectivement là quelque chose d'extrêmement grave : les personnes dépossédées d'elle-mêmes, de leur corps, de leur mort; le soin de leur santé, affaire de spécialistes, de techniciens, qui en décident comme d'une mécanique dont les rouages sont défaillants ; découpage en tranches ou en morceaux ; le foie, les amygdales, les nerfs,etc. Où est l'unité de l'homme, son principe d'origine ? A quoi se rattache-t-il ? Quelle est sa véritable réalité ? Aucune réponse à toutes ces questions. C'est l'angoisse. Qu'à cela ne tienne : il y a les hôpitaux psychiatriques et la chimie."

 

Cela révèle d'une façon éclatante ce qu'il faut bien considérer comme une distance entre l’ostéopathie et la société dans laquelle nous vivons. La même distance devrait pouvoir être observée entre la médecine et la-dite société si cette dernière ne l'avait totalement annexée en tant qu'instrument de pouvoir et source de profit. Tout ceci pour dire que l'enseignement le plus important est celui de l'éthique.

Mais alors, qu'est-ce que l'éthique ?

Peut-on la considérer comme une matière ordinaire venant enrichir un savoir ? Ou bien n'est-elle pas le fruit d'une expérience pratique aboutissant à une connaissance ?

Au fond pratiquer l'éthique, avoir un comportement éthique, c'est avant tout savoir se tourner vers l'autre, c'est chercher dans sa pratique ce qui est bon pour l'autre.

Ou bien peut-on considérer, comme le fait Marc De Smedt, que l'éthique est partie intégrante de l'être humain

 

"On se plaint aujourd'hui de la ruine de la morale : mais pourquoi n'enseigne-t-on plus que le fondement même de l'éthique se trouve en nous mêmes ? Tant que nous n'aurons pas élaboré, avec l'aide des anciennes traditions et pratiques, une nouvelle culture où le silence intérieur, le détachement et la conscience vécue comme telle auront leur place, nous mènerons nos sociétés à la ruine. Car l'être humain ne naît pas mauvais mais nous finissons par le rendre tel par ignorance de notre propre nature." (Marc De Smedt)

 

Auquel cas "enseigner" l'éthique reviendrait en quelque sorte à permettre aux étudiants d'entendre qu'il est important de se mieux connaître. Important pour soi et pour les autres. Un très vaste programme !

AA 

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